Par Mustang - 03-05-2013 23:06:07 - 9 commentaires
Dimanche, en principe c'est direction Radon pour la sortie écouvienne. Mais cette année, ce n'est plus que rarement que je me plie à ce rituel. Pour quelles raisons? Vacances, courses, autres... !
Depuis hier, je me pose la question, vais-je courir en forêt demain? La météo est bonne. J'hésite avec une sortie en VTT. Mon Scott est resté accroché tout cet hiver dans le garage, trop de boue en forêt! Mauvaise raison! L'autre Scott route a eu ma préférence. La promesse du printemps, enfin, m'incite à aller en forêt, mais pour cette fois j'irai à pied. J'ai très envie d'emprunter le chemin qui y conduit depuis mon village. Ce chemin, je le connais pas coeur et je subodore qu'avec le printemps retrouvé, il va m'enchanter. Aussi, ce matin, ma décision est prise, je pars de chez moi vers Ecouves.
Ce n'est pas aux aurores que je pars mais vers 9h30, le temps que la chaleur printannière commence à s'exercer. Je prends la sente du Milieu puis traverse mon village. Mon corps semble en accord avec moi pour cette fois. Faut dire que je le ménage maintenant. Les premières foulées à un rythme lent permettent de mettre aux muscles et aux tendons de s'échauffer sans brusquerie. Seul mon esprit est tendu, avide de capter toutes les sensations que me procure ma progression. J'atteins la campagne rapidement dont l'horizon est barré par le massif écouvien. Je suis agréablement surpris par mes sensations, visiblement mon corps me donne le feu vert.
Je traverse la départementale et emprunte le premier tronçon du chemin. Au loin, j'aperçois un coureur à pied. Ici, on se connait tous et j'ai vite fait d'identier celui qui progresse vers moi. C'est François. Un très grand ultramarathonien. Après une période de galère physique, il est revenu en bonne forme.. et il en profite. Nous nous arrêtons pour échanger sur nos projets respectifs. Ce court moment me permet pas de reprendre mon souffle à proprement parler - je ne suis pas essouflé- mais permet à mon corps de se mettre dans le tempo de la course! Je repars vaillant. La discussion a enflammé mon esprit de courses et de prouesses. Un virage , une voie à traverser et me voilà vraiment dans le chemin.
Les premières jacinthes et la cardamine des près s'y sont données rendez-vous. C'est un chemin de bocage, encore humide des pluies récentes, mais j'attends l'autre, celui ouvert sur la campagne, sur ces grands espaces que j'affectionne. Encore une route à traverser et j'y suis.
Non, rien de grandiose, la simplicité de la nature normande. Un pré, un merisier dans une exubérance blanche.
Un chemin tout simplement. Dans le ciel, l'alouette s'égosille avec ses trilles en volant sur place avant de plonger vers le sol.
Je continue ma progression. le chemin à découvert retrouve ses haies protectrices. La forêt se fait plus proche.
Un banc incite au repos. A vrai dire, je ne sais pas si un séant s'y est jamais posé mais l'idée de ce banc ici est réconfortante. C'est une invitation à la nonchalence.
Le chemin débouche sur une ondulation de la terre. Quelque soit la saison, j'ai toujours été fasciné par cette perspective dénudée, comme la perfection d'un jardin japonais.
Je retrouve la route qui me conduit dans un faubourg de Radon. Puis c'est la montée vers la lisière en petites foulées. Je suis bien.
Je me retourne pour apprécier le paysage. La campagne est légèrement embrumée mais sa vue est bien apaisante.
Je continue ma progression en forêt par un chemin relevé.
L'air est tranquille. Je suis seul. Je traverse le carrefour du chêne à la taverne pour pénétrer dans une sapinière. Verticalité des fûts jaillissant d'un tapis de mousse.
J'oblique vers la gauche par une sente humide qui s'élève ensuite vers une hétraie. Seul le chant des oiseaux de la forêt m'accompagne. Cela me suffit. J'ai l'esprit en paix.
Je traverse le chemin de la messe pour emprunter une longue sente. Les hêtres commencent à se réveiller et tendent leurs jeunes pousses vertes. Ma foulée s'alège. Mon esprit également. C'est dans une sorte d'apesanteur grisante que je progresse. Il y avait bien longtemps que je n'avais été dans de telles dispositions. c'est très troublant et jouissif à la fois. Une sentiment d'éternité m'envahit...
Mais il faut bien rentrer. Je retrouve la route qui conduit à Médavy, empruntée il y a 15 jours par des milliers de coureurs. Une pensée pour Alexandre pour qui c'étaient les dernières foulées de sa jeune vie.
Mais je ne reste pas trop longtemps sur cette route et oblique aux Ragotières à droite vers un chemin boueux, largement boueux! C'est un petit moment ludique! puis à gauche pour une longue ligne droite bocagère. Je débouche en plein champ . A ma droite, la butte Chaumont. A nouveau une route. J'hésite. Je rentre par Colombiers par la route ou la voie romaine. Je sais ce chemin particulièrement boueux et défoncé par les cavaliers. Va pour la boue! Ne pas se prendre la tête, ce n'est que de la boue; Après cet épisode fangeux, je reprends ma foulée régulière, toujours aussi bien! Voilà la voie romaine.
Toujours émouvant de songer à ceux qui m'ont précédé en ces lieux voilà près de 2000 ans!
Bientôt le clocher de mon village émerge au-dessus du colza à la floraison entêtante.
Il est bientôt midi quand je boucle ce périple de plus de 21 km dont chaque instant a été une plénitude.
Il est des moments magiques comme celui-ci, pourtant ô combien banal. Va savoir! Je connais la réponse.
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9 commentaires
Commentaire de la panthère posté le 04-05-2013 à 09:21:55
un moment magique, en accord avec la nature, et tous ces arbres et ces chemins qui te connaissent si bien, bises
Commentaire de Arclusaz posté le 04-05-2013 à 10:19:11
Un chemin tout simplement. Voilà, tout est dit.
je garde précieusement ce billet : si un jour, je ne sais plus pourquoi je cours, je le relirais.
Tu as merveilleusement exprimé par ta plume et tes photos tout ce que je ressens quand je "cours" seul, le matin, dans la campagne.
Merci.
Commentaire de Le Lutin d'Ecouves posté le 04-05-2013 à 13:14:02
Les prés n'ont jamais été aussi verts que cette année ...
Ce matin-là à neuf heures, nous n'étions que deux, moi et ma Josette, les autres étant au Maroc, à Athis ou au diable vauvert. On en a profité pour faire 2h50 en forêt. Chacun son chemin ... mais tout chemin ne vaut que s'il croise un jour celui des autres.
Commentaire de philtraverses posté le 04-05-2013 à 14:39:37
ben moi, je me suis assis sur le banc en question, un jour de mai 2004, alors que j'étais parti en footing de radon. Il penchait en arrière et n'était pas très stable. c'est historique, c'est vrai, c'est simple, mais, curieusement, ce souvenir que j'ai raconté, à qui voulait l'entendre,bien peu, n'a ému personne. On ne peut forcer personne à croiser son chemin.
Commentaire de caro.s91 posté le 04-05-2013 à 14:48:01
Une verdeur éclatante mais apaisante.
Quand je pars courir seule, c'est plus souvent la grisaille urbaine cette année.
Chacun a se vie. profite bien de ton chemin.
Bises,
Caro
Commentaire de philkikou posté le 04-05-2013 à 16:24:15
Avec les mots de Michel Fugain, pour commenter cette belle fugue en sous-bois
(Ah! les sous-bois de hêtres, quel pied, quel calme, j'adore !!!) :
Le printemps est arrivé, sors de ta maison
Le printemps est arrivé, la belle saison
L'amour et la joie sont revenus chez toi
Vive la vie et vive le vent, vive les filles en tablier blanc
Vive la vie et vive le vent et vive le printemps
Dépêche-toi, dépêche-toi, ne perds pas de temps
Commentaire de robin posté le 04-05-2013 à 22:32:33
oui cela valait le coup de laisser le vtt au garage !
robin qui doit envoyer son inscription pour Radon
Commentaire de Benman posté le 04-05-2013 à 23:53:41
Merci. C'est plein de grâce un Mustang en forêt.
Commentaire de francois 91410 posté le 08-05-2013 à 22:26:03
en accord avec la nature et avec toi-même le temps d'une sortie : que demander de mieux avant de rentrer et de retrouver la vraie vie ?!
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